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« "Notre résistance à Donald Trump ne doit pas conduire au dogmatisme ou à la coercition…" Tout est dit dans l'accroche de cette importante tribune publiée, le mardi 7 juillet, sur le site du vénérable magazine d'idées Harper's Magazine – et reproduite en intégralité par nos confrères du Monde. Intitulé "Lettre sur la justice et un débat ouvert", signé par plus de cent cinquante personnalités internationales issues du monde des arts, des lettres et de l'université, le texte appelle à une prise de conscience face aux menaces que font peser (entre autres) les réseaux sociaux contre la liberté d'expression. Particulièrement aux États-Unis, nation piégée entre les dérives inquiétantes de la présidence ultra-droitière de Trump et, en face, la radicalisation fulgurante d'un progressisme devenu fou à force d'obsessions identitaires et d'intolérance viscérale au débat contradictoire. Parmi les signataires de la missive : Margaret Atwood, Salman Rushdie, Kamel Daoud, Francis Fukuyama, Bill T. Jones, Noam Chomsky, l'autrice féministe Gloria Steinem, le trompettiste de jazz Wynton Marsalis ou encore J. K. Rowling. Objet de leur mobilisation : s'opposer à tyrannie de la contrition qui, depuis quelque temps, pousse de nombreuses personnalités à des excuses publiques pour des prises de position jugées insupportables par une partie de la "twittosphère". »
« En réaction à ce climat de susceptibilités extrêmes sur de complexes questions et qui risque, à terme, de pousser tout un chacun à l'autocensure, l'éditorialiste Thomas Chatterton Williams, contributeur du New York Times et pour Harper's Magazine, s'est donc impliqué voici un mois dans la gestation de cette lettre ouverte. […] Rédigé par une vingtaine de collaborateurs, comme l'a confié Williams au Washington Post, le texte a ensuite été envoyé à des signataires aux profils très divers. "Nous voulions que ce document reflète cette réalité que beaucoup de personnes qui ne sont pas de vieux hommes blancs partagent ces inquiétudes" a déclaré au journal ce trentenaire, par ailleurs auteur en 2019 de l'ouvrage Self-Portrait in Black and White – Unlearning race (éd. W. W. Norton & Company) et lui-même fils d'un père noir et d'une mère blanche. Que contient précisément la tribune ? Elle débute par un état des lieux alarmiste tout en affirmant sans ambiguïté son combat contre les "forces illibérales" portées par Donald Trump : "Nos institutions culturelles sont aujourd'hui à l'épreuve. Les puissantes manifestations en faveur de la justice raciale et sociale revendiquent une réforme de la police trop longtemps différée et font plus largement entendre des appels pour davantage d'égalité et d'inclusion dans notre société, notamment dans l'enseignement supérieur, le journalisme, la philanthropie et les arts. Mais cette nécessaire prise en compte a aussi renforcé tout un ensemble de postures morales et d'engagements politiques qui risquent d'affaiblir les règles du débat public et l'acceptation des différences au profit d'un conformisme idéologique. Autant nous avons salué la première phase de ce mouvement, autant nous voulons nous élever contre la seconde". »
« Le texte se poursuit : "L'inclusion démocratique que nous appelons de nos vœux ne peut advenir que si nous refusons le climat d'intolérance général qui s'est installé de part et d'autre. L'échange libre des informations et des idées, qui est le moteur même des sociétés libérales, devient chaque jour plus limité. La censure, que l'on s'attendait plutôt à voir surgir du côté de la droite radicale, se répand largement aussi dans notre culture : intolérance à l'égard des opinions divergentes, goût pour l'humiliation publique et l'ostracisme, tendance à dissoudre des questions politiques complexes dans une certitude morale aveuglante. Nous défendons le principe d'un contre-discours solide et même caustique de toutes parts". Évoquant "une atmosphère étouffante [qui] va finir par nuire aux causes les plus vitales de notre époque", la lettre ouverte se conclut par un ferme appel à la vigilance : "Pour vaincre de mauvaises idées, il faut les exposer, argumenter et convaincre, et non pas essayer de les taire ou espérer qu'elles disparaissent. Nous rejetons les faux choix qu'on nous présente entre la justice et la liberté : l'une n'existe pas sans l'autre. En tant qu'écrivains, notre métier repose sur la marge que la société nous accorde pour l'expérimentation, la prise de risque et même l'erreur. Nous avons besoin de préserver la possibilité d'un désaccord de bonne foi sans conséquences professionnelles désastreuses." »
« Dans les heures qui ont suivi sa publication sur le site de Harper's, ce texte n'a pas manqué à son tour de s'attirer un déluge de critiques ou remarques acerbes. […] Pour Matt Zoller Seitz, critique télé pour le New York Magazine, "Cette lettre du Harper's Magazine n'aurait jamais dû être écrite. Ses instigateurs semblent totalement inconscients du mal que certains de ses signataires ont causé", écrit-il sur Twitter, visant implicitement J. K. Rowling. En découvrant que celle-ci était leur voisine de tribune, certaines plumes ont demandé au Harper's Magazine de retirer leur nom de cette lettre ouverte, telle l'autrice transgenre Jennifer Finlay Boylan. La présence dans la liste d'une Rowling en totale disgrâce s'avère ainsi une épine majeure dans le pied de cette tribune pourtant fort pertinente au vu du contexte néomaccarthyste en cours aux États-Unis. »
« Au vu de la tempête déclenchée par la lettre du Harper's Magazine, les hostilités ne sont pas près de retomber. Mais au moins, une vraie réponse s'organise pour appeler à un peu plus de raison, de mesure et de bon sens face à l'absolutisme moral d'un certain camp du bien. »
« En réaction à ce climat de susceptibilités extrêmes sur de complexes questions et qui risque, à terme, de pousser tout un chacun à l'autocensure, l'éditorialiste Thomas Chatterton Williams, contributeur du New York Times et pour Harper's Magazine, s'est donc impliqué voici un mois dans la gestation de cette lettre ouverte. […] Rédigé par une vingtaine de collaborateurs, comme l'a confié Williams au Washington Post, le texte a ensuite été envoyé à des signataires aux profils très divers. "Nous voulions que ce document reflète cette réalité que beaucoup de personnes qui ne sont pas de vieux hommes blancs partagent ces inquiétudes" a déclaré au journal ce trentenaire, par ailleurs auteur en 2019 de l'ouvrage Self-Portrait in Black and White – Unlearning race (éd. W. W. Norton & Company) et lui-même fils d'un père noir et d'une mère blanche. Que contient précisément la tribune ? Elle débute par un état des lieux alarmiste tout en affirmant sans ambiguïté son combat contre les "forces illibérales" portées par Donald Trump : "Nos institutions culturelles sont aujourd'hui à l'épreuve. Les puissantes manifestations en faveur de la justice raciale et sociale revendiquent une réforme de la police trop longtemps différée et font plus largement entendre des appels pour davantage d'égalité et d'inclusion dans notre société, notamment dans l'enseignement supérieur, le journalisme, la philanthropie et les arts. Mais cette nécessaire prise en compte a aussi renforcé tout un ensemble de postures morales et d'engagements politiques qui risquent d'affaiblir les règles du débat public et l'acceptation des différences au profit d'un conformisme idéologique. Autant nous avons salué la première phase de ce mouvement, autant nous voulons nous élever contre la seconde". »
« Le texte se poursuit : "L'inclusion démocratique que nous appelons de nos vœux ne peut advenir que si nous refusons le climat d'intolérance général qui s'est installé de part et d'autre. L'échange libre des informations et des idées, qui est le moteur même des sociétés libérales, devient chaque jour plus limité. La censure, que l'on s'attendait plutôt à voir surgir du côté de la droite radicale, se répand largement aussi dans notre culture : intolérance à l'égard des opinions divergentes, goût pour l'humiliation publique et l'ostracisme, tendance à dissoudre des questions politiques complexes dans une certitude morale aveuglante. Nous défendons le principe d'un contre-discours solide et même caustique de toutes parts". Évoquant "une atmosphère étouffante [qui] va finir par nuire aux causes les plus vitales de notre époque", la lettre ouverte se conclut par un ferme appel à la vigilance : "Pour vaincre de mauvaises idées, il faut les exposer, argumenter et convaincre, et non pas essayer de les taire ou espérer qu'elles disparaissent. Nous rejetons les faux choix qu'on nous présente entre la justice et la liberté : l'une n'existe pas sans l'autre. En tant qu'écrivains, notre métier repose sur la marge que la société nous accorde pour l'expérimentation, la prise de risque et même l'erreur. Nous avons besoin de préserver la possibilité d'un désaccord de bonne foi sans conséquences professionnelles désastreuses." »
« Dans les heures qui ont suivi sa publication sur le site de Harper's, ce texte n'a pas manqué à son tour de s'attirer un déluge de critiques ou remarques acerbes. […] Pour Matt Zoller Seitz, critique télé pour le New York Magazine, "Cette lettre du Harper's Magazine n'aurait jamais dû être écrite. Ses instigateurs semblent totalement inconscients du mal que certains de ses signataires ont causé", écrit-il sur Twitter, visant implicitement J. K. Rowling. En découvrant que celle-ci était leur voisine de tribune, certaines plumes ont demandé au Harper's Magazine de retirer leur nom de cette lettre ouverte, telle l'autrice transgenre Jennifer Finlay Boylan. La présence dans la liste d'une Rowling en totale disgrâce s'avère ainsi une épine majeure dans le pied de cette tribune pourtant fort pertinente au vu du contexte néomaccarthyste en cours aux États-Unis. »
« Au vu de la tempête déclenchée par la lettre du Harper's Magazine, les hostilités ne sont pas près de retomber. Mais au moins, une vraie réponse s'organise pour appeler à un peu plus de raison, de mesure et de bon sens face à l'absolutisme moral d'un certain camp du bien. »